Ce que c'est que Regarder au-dessus de soi, et ce que
c'est que Regarder au-dessous de soi.

DOCTRINE DE LA CHARITE
PAR EMMANUEL SWEDENBORG
EXTRAITE DES ARCANES CELESTES
TRADUITE DU LATIN PAR J.-F.-E. LE BOIS DES GUAYS
1885

SWEDENBORG



L'homme a été créé de manière à ce qu'il puisse regarder en haut ou au-dessus de lui, et aussi regarder en bas ou au-dessous de lui. Regarder au-dessus de soi, c'est tourner ses regards vers le prochain, vers la patrie, vers l'église, vers le Ciel, principalement vers le Seigneur ; mais regarder au-dessous de soi, c'est tourner ses regards vers la terre, vers le inonde, et principalement vers soi.
Si tourner ses regards vers le prochain, vers la patrie et, vers l'église, c'est regarder au-dessus de soi, c'est parce que c'est regarder vers le Seigneur, car le Seigneur est dans la charité, et il est de la charité de regarder vers le prochain, la patrie et l'église, c'est-à-dire, de leur vouloir du bien : au contraire, ils regardent au-dessous d'eux-mêmes, ceux qui se détournent du prochain, de la patrie et de l'église, et ne veulent du bien qu'à eux-mêmes.
Regarder au-dessus de soi, c'est être élevé par le Seigneur, car personne ne peut regarder au-dessus de soi, à moins d'être élevé par Celui qui est au-dessus : au contraire, regarder au-dessous de soi, cela vient de l' homme, parce qu'alors l'homme ne se laisse pas élever.
Ceux qui sont dans le bien de la charité et de la foi regardent au-dessus d'eux, parce qu'ils sont élevés par le Seigneur ; mais ceux qui ne sont pas dans le bien de la charité et de la foi regardent au-dessous d'eux, parce qu'ils ne sont pas élevés par le Seigneur : l'homme regarde au-dessous de lui, alors qu'il tourne vers lui l'influx du vrai et du bien procédant du Seigneur ; celui qui tourne vers soi le bien et le vrai influant du Seigneur se voit et voit le monde devant soi, et ne voit ni le Seigneur, ni le bien et le vrai du Seigneur, parce qu'ils sont pour lui par derrière ; de là ils sont pou r lui dans une telle obscurité, qu'il ne s'en inquiète pas, et qu'enfin il les nie.
Par regarder au-dessus de soi et regarder au-dessous de soi il est entendu avoir pour fin ou aimer par-dessus toutes choses ; ainsi, par regarder au-dessus de soi, il est entendu avoir pour fin ou aimer par-dessus toutes choses celles qui appartiennent au Seigneur et au Ciel ; et par regarder au-dessous de soi il est entendu avoir pour fin et aimer par-dessus toutes choses celles qui appartiennent à soi-même et au monde ; les intérieurs de l'homme se tournent même réellement où se tourne l'amour.
L'homme qui est dans le bien de la charité et de la foi s'aime aussi lui-même et aime le monde, mais non autrement que comme on aime les moyens pour la fin ; chez lui l'amour de soi regarde l'amour du Seigneur,, Par il s'aime comme moyen pour la fin de pouvoir servir, le Seigneur; et chez lui l'amour du monde regarde l'amour du prochain, car il aime le monde comme moyen pour la fin de pouvoir servir le prochain : lors donc que le moyen est aimé pour la fin, ce n'est pas le moyen qui est aimé, mais c'est la fin.
De là on peut voir que ceux qui sont dans la gloire du monde, c'est-à-dire, dans la prééminence et dans l'opulence plus que les autres, peuvent regarder au-dessus d'eux vers le Seigneur, de même que ceux quine sont ni dans la prééminence ni dans l'opulence ; car ils regardent au-dessus d'eux alors qu'ils ont la prééminence et l'opulence pour moyen et non pour fin.
Regarder au-dessus de soi est propre à l'homme, mais regarder au-dessous de soi est propre aux bêtes: il suit de là qu'autant l'homme regarde au-dessous de lui on en bas, autant il est bête, et autant aussi il est l'image de l'enfer, et qu'autant il regarde au-dessus de lui ou en haut, autant il est homme et autant aussi il est l'image du Seigneur.



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